Pourquoi le travail ?
Par l’habitude, il est devenu « normal,
évident » de vendre une partie de sa vie à une entreprise afin d’y
gagner par l’effort un salaire nous
permettant plus ou moins bien de vivre. Telles sont les données immédiates et
évidentes de notre existence sociale. Mais ce ne sont pas celles de Guille,
enfant arrivant dans un monde qui lui est encore étranger et par là même non
encore pris dans les filets de nos réponses. « Pourquoi le travail, le
salaire, la nécessité de se vendre pour vivre, etc.», demande t’il à Mafalda.
Aucune réponse ne lui semble à lui évidente et pour clore le débat il reçoit le
très commun : « parce que le monde fonctionne comme ça ».
Mais la réponse est insuffisante puisque le fait qu’un comportement soit
partagé par tous ne prouve pas que celui-ci soit bon. Aussi interroge t’il sans
cesse – « pourquoi ? » - demandant aux faits de se
justifier. Et, en effet, pourquoi se vendre à une entreprise ? Ne
serait-il pas souhaitable d’être son propre maître ? Est-ce
possible ? Et pourquoi ? Pourquoi enfin certains achètent-ils une
partie de nos vies et d’autres moins nombreux s’en font les acquéreurs ?
Est-ce juste ? Pourquoi ? On saisit ainsi que la question « pourquoi »
vise la justification dernière de nos vies et de nos pratiques. Le dernier mot
de Mafalda note ainsi combien cette question est proprement révolutionnaire.
Tout pouvoir voulant rester en place a, en effet, intérêt à ce que se taise dans l’évidence muette la question
« pourquoi ». Car dès lors qu’elle naît c’est une distance au
monde donné qui se crée avec la possibilité nouvelle de le bouleverser. De là
les « gaz lacrymogènes », réponse classique des forces de
l’ordre établi à ceux qui ne se satisfont pas du monde tel qu’il est.